La Lettre des Résidences Seniors : C’est au Sénat qu’on doit l’article 15 de la loi d’adaptation de la société au vieillissement définissant les résidences services. Pourquoi était-il nécessaire de légiférer sur ce thème ?
Gérard Roche : La prise en charge de la dépendance et, plus généralement, des personnes âgées est un problème majeur dans notre pays. Le maintien à domicile fonctionne bien avec une double raison économique. D’un côté, une économie sociale reposant principalement sur des associations comme l’ADMR. De l’autre, une économie de marché ouverte par la loi Borloo en 2005. Cette dualité entre économie sociale et économie de marché posait un problème philosophique que nous avons voulu résoudre en organisant la convergence entre l’autorisation et l’agrément. Désormais, les services prestés auprès des personnes âgées et des personnes handicapées sont placés sous le régime de l’économie sociale et autorisés par le Département.
La LRS : Et concernant plus précisément les résidences seniors ?
G.R. : : J’y viens. A l’autre bout de la chaîne, les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) doivent faire face à de vraies difficultés. L’âge moyen d’entrée en Ehpad était de 75 ans il y a quelques années ; il est aujourd’hui de 85 ans. Le Gir moyen pondéré de ces établissements augmente de façon récurrente et les maisons de retraite sont aujourd’hui devenues des hôpitaux de fin de vie.
Cela a deux conséquences. D’une part, la conception architecturale de nombreux Ehpad n’est plus adaptée aux nouveaux profils des résidents. D’autre part, le nombre d’agents par lit est insuffisant, particulièrement pour les Gir 1 et 2. Pourtant, les prix de journées sont toujours élevés et le reste à charge est devenu un poids pour de nombreuses familles. Celles-ci n’auront donc pas les moyens de financer la rénovation des Ehpad à travers l’hébergement. D’où le travail que nous avons souhaité mener sur l’habitat intermédiaire.
La LRS : Pouvez-vous nous en dire plus ?
G.R. : La loi ASV modernise les ex-logements-foyers en les rebaptisant « résidences autonomie » et en leur attribuant une mission de prévention. Elle encadre par ailleurs le modèle des résidences services d’ancienne génération, en empêchant notamment que le syndic de copropriété puisse être lui-même prestataire de services à la personne. Enfin, nous avons voulu créer un cadre pour les résidences services de nouvelle génération, celles qui sont proposées à la location. Alors que l’argent public vient à manquer, nous sommes face à une véritable opportunité. Des investisseurs privés se proposent d’investir pour construire des résidences pour personnes âgées et se suppléer ainsi au service public.
Malgré tout, il était nécessaire de protéger les intérêts des résidents afin d’éviter que ces résidences ne soient uniquement des établissements de profit. C’est la raison pour laquelle nous avons, avec mon collègue Georges Labazée, tenu à inscrire cette définition des « résidences services » dans la loi.
La LRS : Comment voyez-vous l’avenir du secteur des personnes âgées en France ?
G.R. : J’ai été médecin de famille, puis médecin hospitalier en neurologie, conseiller général, président de Département, et enfin sénateur. Depuis tout ce temps, je m’intéresse au vieillissement de la population et constate qu’il y a un gros problème que personne n’ose aborder car les enjeux financiers sont énormes. Il s’agit, vous l’aurez compris, du reste à charge pour les résidents et leurs familles. Je suggère donc deux pistes de réflexion.